21.06.2018

Université d’été de la Bibliothèque Kandinsky

Lucile Haute participe à la session 2018, du 2 au 13 juillet :

LES SOURCES AU TRAVAIL
Publications d’artistes: de l’atelier à la bibliothèque
(et vice-versa)

L’Université d’été de la Bibliothèque Kandinsky est un programme du Centre Pompidou qui se déroule dans l’espace des collections contemporaines du Musée national d’art moderne. Elle a pour objet les sources de l’art moderne et contemporain : archives, documentation écrite, photographique ou filmique, témoignages, formes d’appropriation artistique de la production documentaire. Initiative interdisciplinaire, l’Université d’été de la Bibliothèque Kandinsky réunit de jeunes chercheur.e.s : historiens et historiens de l’art, anthropologues et sociologues, artistes, critiques, commissaires d’expositions, qui partagent un travail collectif sur les sources documentaires. La table-vitrine de l’Université d’été sert à la fois comme table de montage et d’exposition. Elle recueille fac-similés, reproductions, sources archivistiques et documentaires proposées ou évoquées au cours des séances. Plusieurs ateliers d’écriture rythment le parcours de l’Université d’été. Des visites dans différents lieux et collections documentaires émailleront les journées de travail. Le numéro cinq du « Journal de l’Université d’été de la Bibliothèque Kandinsky » sera tout à la fois un recueil de sources et une création collective qui reflètera les débats poursuivis pendant les séances de travail.

« Tout, au monde, existe pour aboutir à un livre ». Emblématiques, les mots de Stéphane Mallarmé ont guidé de manière subtile les nombreuses recherches et expérimentations sur les publications d’artistes, inspirant appropriations, réactivations, et tentatives de définition. A l’autre bout du spectre historique et dans le même effort de définition d’une pratique artistique élargie, Ulises Carrión rappelait que les « artistes ont publié des livres et des revues, tout en les distribuant, en gérant des galeries et des centres d’art, organisant des événements culturels à travers différentes médias et avec des professions spécialisées. En d’autres mots : ils ont abandonné le terrain sacré de l’art et sont entrés dans l’espace plus vaste et moins délimité de la culture. »

Pour sa cinquième session, l’Université d’été de la Bibliothèque Kandinsky se propose d’étudier le phénomène protéiforme des pratiques de publication d’artiste, à l’aune de ses formes matérielles les plus diverses. Il s’agira également de saisir les réseaux mis en place, et de mettre en lumière les échanges, les contextes et les géographies multiples qui participent de l’élaboration de stratégies de création.
En résonance avec les recherches récentes sur les livres d’artistes, tant sur les stratégies d’édition artistique à l’ère de la conversion multimédia que sur les pratiques éditoriales alternatives, cette nouvelle édition mettra en débat les limites et les déplacements d’un genre extrêmement versatile. Se référant à la fois au champ de la littérature et de l’art, et au monde dans lequel elles s’inscrivent, les publications d’artistes résistent à toute classification restrictive. Si on devait dégager une de leurs spécificités, elle résiderait sans doute dans leur singularité formelle et dans l’inventivité incessante de leurs méthodes de production.

Objet aux contours flexibles, la publication d’artiste sera confrontée à différentes ouvertures disciplinaires ; l’histoire du livre et de l’édition, les media studies, les théories de la communication visuelle au sein desquelles les recherches menées par la théorie et les pratiques du design graphique ont amplement déplacé les frontières définitionnelles, les modes de production et les gestes d’exposition. Sans en épuiser les déclinaisons, les interventions devront porter sur la multiplicité des formats, des techniques et des médiums : livres et périodiques d’artistes, fanzines et samizdats, multiples et livres objets, livres de photographie, livres d’architecture et livres de curateur, éphémèra et éditions hybrides, jusqu’aux explorations numériques, aux e-books d’artiste et aux formes de l’autoédition contemporaine. Etudes de cas focalisées sur les productions, les producteurs et les institutions historiques de l’édition d’artiste devront alterner avec des propositions contemporaines qui réfléchissent de manière critique aussi bien sur la place, les profils des artistes, leur position en tant qu’éditeurs, que sur le statut de l’objet publié et les différentes cultures artistiques et techniques auxquelles il s’attache.

Des savoir-faire alternatifs aux stratégies de patrimonialisation de ces objets documentaires, ainsi que la variété de leurs modes de diffusion, l’Université d’été interrogera également les circuits et les économies qui sous-tendent les pratiques éditoriales artistiques. En perturbant les genres conventionnels, quelles tactiques d’écriture créative, de description bibliographique et d’élaboration de contenu sont mises en place ? Comment les circuits de savoir (académique ou artistique) et les circuits de production affectent-ils l’objet publié ? Quel est le profil des acteurs qui y interviennent ? Quels sont les risques et dérives dans l’économie des éditions d’artistes ? Quelles formes d’apprentissage, de pédagogie et de transmission sont mobilisées ? Quelle place donner à l’auctorialité pour un objet qui joue incessamment avec sa nature autoréférentielle, tout en étant un lieu de travail collectif exemplaire ? Comment « faire collection » avec des objets qui se déplacent avec légèreté entre une bibliothèque, un musée, un espace indépendant et ses avatars numériques ? Enfin, comme Carrión le laissait entendre, la publication d’artiste n’est qu’une pratique parmi d’autres et reste souvent le reflet, ou la trace, d’autres formes d’engagement artistique, mais aussi politique et social. Comment penser alors cet engagement à travers les formes de publications artistiques, devenues les documents pluridisciplinaires d’une action et les territoires d’une construction collective ? Comment ces publications renseignent-elles les œuvres de ces mêmes artistes, mais hors du champ éditorial ? Quelle lecture viennent-elles ajouter ou permettent-elles de déplier au regard de leurs œuvres constituées par ailleurs ?

Selon son principe de travail structurant, l’Université d’été met à disposition des participants un ensemble de ressources documentaires conservées par la Bibliothèque Kandinsky et notamment sa grande collection de publications et éditions d’artistes. Elle invite les participants à enrichir le débat en partageant les sources de travail sur lesquelles ont reposé leurs recherches et à poursuivre des opérations historiographiques sur un mode critique et inventif.

COMITE DE PILOTAGE
Aurélien Bernard, bibliothécaire en charge des imprimés contemporains, Bibliothèque Kandinsky, Musée National d’Art Moderne, Centre Pompidou, Paris
Mica Gherghescu, historienne de l’art, Bibliothèque Kandinsky, Musée National d’Art Moderne, Centre Pompidou, Paris
Stéphanie Rivoire, conservatrice des fonds et collections, Bibliothèque Kandinsky, Musée National d’Art Moderne, Centre Pompidou, Paris
Didier Schulmann, conservateur, Bibliothèque Kandinsky, Musée National d’Art Moderne, Centre Pompidou, Paris
Benjamin Thorel, historien de l’art, École supérieure des Beaux-Arts de BordeauX/fondateur de Section 7 Books / After 8 Books

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